
Ce vendredi 21 mars 2025 s’est tenu un Conseil Municipal à Rodez, marqué par une note censée aborder un sujet crucial : la sécurité. Une note manifestement rédigée à la hâte par le maire, en réaction aux dégradations de véhicules survenues en début d’année.
Au vu de l’importance du sujet — maintes fois abordé dans la presse —, nous espérions recevoir des documents de travail sérieux, construits et argumentés. Au lieu de cela, nous avons eu droit à une note expéditive, présentant 12 axes résumés chacun en une seule ligne.
Peut-être cela suffit-il à la majorité municipale, dont certains membres semblent traiter la situation avec désinvolture. Mais pas à nous.
Car oui, parler de l’installation de 300 caméras de vidéosurveillance, de l’armement de la police municipale ou encore de la présence de vigies dans les rues, ce sont des sujets majeurs. Ils méritent une réflexion approfondie, une transparence totale et un débat démocratique.
Pourquoi 300 caméras ? Où seront-elles installées, à quel moment, avec quel budget ?
Pourquoi armer la police municipale ? Quelles seront ses missions, ses horaires, ses effectifs ?
Faut-il une brigade de nuit ? Et si oui, avec quelles compétences et quelle articulation avec la police nationale, dont les effectifs ne cessent de diminuer ?
Ce sont autant de questions que nous portions avec nous en entrant dans ce Conseil Municipal, dans l’espoir d’un échange constructif. Après que la majorité a sciemment évité tout travail en commission pour empêcher tout débat préalable.
À la place, nous avons assisté à un véritable spectacle : une première adjointe brandissant une pancarte ramassée dans la rue pour dénoncer des Ruthénoises osant réclamer leurs droits, et un maire hors de tout cadre, monopolisant la parole pendant plus d’une heure pour régler ses comptes avec d’anciens colistiers.
Et le débat, dans tout ça ?
Inexistant. Obstrué. Étouffé.
Monsieur le Maire, vous souhaitiez un chèque en blanc pour appliquer une série de mesures sans concertation ni transparence ?
Vous l’avez obtenu de votre majorité et de vos anciens alliés, mais vous ne l’aurez pas de Rodez Citoyen.
La sécurité des Ruthénois et des Ruthénoises est un sujet bien trop sérieux pour être traité de manière aussi légère.
A Rodez Citoyen, nous pensons qu’une véritable politique publique de sécurité ne se rédige pas en 12 lignes et ne peux s’envisager sans un volet prévention digne de ce nom.
Notre intervention au Conseil municipal du 21 mars 2025
Nous sommes extrêmement surpris de ne pas avoir été informés de cette note lors de nos commissions. Nous nous interrogeons sur les circonstances de son élaboration.
Cette idée a-t-elle émergé récemment et été conçue à la hâte en moins de deux semaines ? Si tel est le cas, nous ne pouvons qu’exprimer notre indignation face à un traitement aussi superficiel d’un sujet d’une telle importance.
Ou bien cette décision résulte-t-elle d’un calcul délibéré et d’une attitude antidémocratique, visant à éviter toute discussion avec l’ensemble des élu.e.s dans le cadre plus serein des commissions ? Là encore, nous ne pouvons que nous offusquer qu’une majorité refuse le débat et attende le conseil municipal pour orchestrer un spectacle médiatique devant les journalistes.
Cette note manque cruellement de détails et nous prendrons le temps d’analyser en profondeur chacun des axes et des actions proposés quand nous aurons des notes détaillées sur leurs mises en place. Mais avant toute chose, nous tenons à exprimer notre stupéfaction. Nous sommes choquées par l’orientation sécuritaire que vous proposez, en total décalage avec l’image que vous revendiquez : celle d’une ville parmi les plus sûres de France. Comment pouvez-vous, en vous targuant d’être « en tête du peloton » des villes sûres, adopter une politique sécuritaire d’inspiration droitière ? Et ce, pour répondre à un simple « sentiment d’insécurité » ? Vous alimentez ainsi les discours anxiogènes relayés en boucle par certains médias et confortés par une politique gouvernementale qui ne parle que sécurité. C’est affligeant. Que 2008, quand vous évoquiez la transformation de la police municipale en police de proximité, semble loin aujourd’hui… Que vous est-il arrivé ?
Action 1 – Des chiffres inexacts et un amalgame trompeur
Vos chiffres sont faux : Rodez compte 4,4 policiers municipaux pour 10 000 habitants, en dessous de la moyenne nationale (5,4). Les chiffres que vous présentez sont obtenus en additionnant les policiers municipaux, les ASVP et même les secrétaires – c’ est une contre vérité. Les ASVP (agents de surveillance de la voie publique) ont des missions bien différentes :
- Surveillance du stationnement
- Verbalisation de certaines infractions
- Contrôle de la circulation
- Veille à la propreté des espaces publics
- Information et orientation des usagers
Les assimiler aux policiers municipaux est une manipulation que nous jugeons malhonnête.
Rappel : Rodez compte 11 policiers municipaux et 6 ASVP (dont le placier).
Nous sommes malgré tout satisfaits que vous reconnaissiez enfin la nécessité d’augmenter les effectifs de police municipale, comme nous le réclamons depuis 2020.
Mais un point nous interpelle : vous dénoncez la baisse des effectifs de la police nationale, mais n’avez jamais pris position contre les choix gouvernementaux qui ont mené à ces suppressions. Est-ce au maire de pallier ces manques en remplaçant la police nationale par la municipale ? Ces deux corps n’ont ni les mêmes formations, ni les mêmes missions, ni les mêmes moyens.
Action 3 – Opposition ferme à l’armement létal
Nous nous opposons très clairement à l’armement de la police municipale avec des armes létales. Ce serait entériner le désengagement de l’État, alors que la sécurité des citoyens est une mission régalienne de la police nationale, formée, équipée et payée pour cela.
La police municipale joue un autre rôle : proximité, prévention, tranquillité publique, lutte contre les incivilités. Armer les agents municipaux, c’est dénaturer leur mission.
Par ailleurs, comme vous le rappelez vous-même : Rodez est une des villes les plus sûres de France. Il s’agit de rassurer, pas de militariser.
Enfin, les coûts liés à cette mesure sont importants : formation, entraînement, achat d’armes et de munitions, création d’une armurerie… Avez-vous seulement chiffré cette opération ?
Cette mesure est une dérive sécuritaire coûteuse et inutile.
Actions 4 et 6 – Une promesse de caméras sans fin
Depuis des années, vous annoncez des centaines de caméras… Entre 2019 et 2024, seulement 36 caméras ont été posées (cf. rapport annuel d’activité 2024). Et aujourd’hui, vous en promettez 337 ! Où est la cohérence ?
Beaucoup d’annonces, beaucoup d’argent dépensé, très peu de résultats.
Action 5 – De la vidéoprotection à la vidéosurveillance : une dérive assumée ?
Vous vous étiez engagés à ce que la vidéoprotection ne se transforme jamais en vidéosurveillance. Aujourd’hui, ce glissement est une réalité.
À chaque conseil, vous avez affirmé que ce n’était pas votre intention. Et pourtant, nous voilà face à une politique de surveillance de masse.
Quelle est la prochaine étape ? Quelle nouvelle dérive vous préparez-vous à acter ?
Nous espérons que Mme Bultel respectera ses engagements en votant contre cette mesure, qui contredit les promesses faites aux Ruthénois.
Ce revirement confirme l’échec des premières installations, inefficaces pour lutter contre la délinquance. Et le gâchis d’argent public.
Action 7 – Éclairage public : le grand écart
Vous défendiez hier une extinction totale, rejetant toute nuance. Aujourd’hui, vous rallumez tout, sans concertation, sans réflexion.
Nous vous avions alertés sur les inconforts ressentis par les habitants, vous les avez niés. Nous réclamions une extinction réfléchie en fonction des zones, des quartiers et des besoins des habitants Aujourd’hui, vous changez d’avis diamétralement, sans prendre en compte les impacts sur la biodiversité.
M. Lauras, cette décision va à l’encontre des valeurs que vous défendez, nous espérons que vous voterez contre avec Mme Bultel.
Dans votre majorité, c’est toujours tout ou rien, sans juste milieu.
Action 8 – Trottoirs et traversées piétonnes : il était temps
Que dire, sinon : il était temps. Après trois mandats, vous commencez à vous intéresser à la sécurisation des cheminements piétons. Nous ne pouvons que le saluer, tout en déplorant ce retard considérable.
Action 9 – Vitesse et radars pédagogiques : un revirement bienvenu
À de nombreuses reprises, nous vous avons alertés sur la vitesse excessive dans certains quartiers. Vous répondiez que tout était sous contrôle, et que les radars pédagogiques étaient « moches ».
Nous sommes heureux que vous ayez enfin changé d’avis.
Action 12 – Voisins vigilants : vers une société de surveillance ?
Ce dispositif, bien qu’habillé d’un vernis de « solidarité », est un marqueur de la droite dure. Il est présenté comme un outil de prévention, mais glisse vers une société de la méfiance.
Des risques existent :
- Délations
- Suspicion généralisée
- Surveillance informelle
Pourquoi faire appel à une entreprise privée pour « transmettre aux autorités compétentes » ? Les services publics et les numéros d’urgence ne suffisent-ils pas ?
Le programme de participation citoyenne lancé en 2011 par le ministère de l’Intérieur offre une alternative plus respectueuse du cadre républicain, en associant forces de l’ordre, élus et citoyens dans une démarche partenariale.
Confondre ce programme avec les offres commerciales de « Voisins Vigilants et Solidaires » soulève des inquiétudes sur la privatisation de la sécurité.
Nous appelons à une réflexion éthique : ces dispositifs ne renforcent pas la cohésion sociale, ils l’abîment. Encourager les Ruthénois à être solidaires plutôt que vigilants, voilà ce qui devrait nous rassembler.
Nous dénonçons une note qui traduit un virage sécuritaire assumé, disproportionné, coûteux et inefficace. Plutôt que de répondre à un sentiment, agissons sur le réel, en consolidant les liens sociaux, en renforçant les services publics, en faisant de la prévention notre priorité.
Nos propositions
Après ces premières interventions il est donc évident que Rodez Citoyen va voter contre cette note.
Mais bien sûr, la sécurité et la tranquillité des habitants de Rodez nous tiennent fortement à cœur. Une politique publique de sécurité sans son volet prévention n’a pas de sens. Aussi nous proposons aujourd’hui les moyens suivants pour mettre en œuvre des actions de prévention :
- Recruter des éducateurs et des médiateurs de quartiers
- Développer la police de proximité
- Doter les maisons de quartier de plus de moyens humains et financiers
- Contribuer au financement de la mission locale départementale pour l’accompagnement des jeunes des quartiers
- Remettre le CISPD au cœur des actions de prévention conduites par les acteurs locaux en renforçant son rôle de coordination
- Créer de véritables comité de quartier pour rendreles habitants acteurs de leurs quartiers et favoriser des liens de solidarité entre voisins.
Toutes ces mesures nous permettront d’agir d’avantage à titre préventif que répressif.
Enfin, nous vous proposons également de mettre en place une consultation citoyenne sur le sujet de l’armement ou non de la police municipale, pour voir si cela répond vraiment à une attente des ruthénois et ruthénoises.
La note présentée en Conseil


